Voici le onzième billet d’une série rédigée par Mary Ann Baynton, directrice générale, Stratégies et collaboration, Stratégies en milieu de travail sur la santé mentale.
Repenser la santé mentale
S’il y a une chose indéniablement positive à retenir de la pandémie mondiale, c’est qu’elle a donné une plus grande visibilité aux enjeux liés à la santé mentale. Alors que les troubles mentaux recevaient déjà une certaine attention au travail en raison de l’obligation d’offrir des mesures d’adaptation, la santé mentale – que chacun gère au quotidien – était souvent tenue pour acquise. Pendant la pandémie, tout le monde était stressé. Les niveaux d’épuisement professionnel étaient élevés. Dans ce contexte, des sujets comme la résilience et les stratégies favorisant une bonne santé mentale ont attiré l’attention. De nombreux employés et leaders ont commencé à accorder la priorité au bien-être, à la prise en charge de soi, à la gestion de la charge de travail, aux liens sociaux et à la qualité de vie – autant d’éléments qui contribuent à une bonne santé mentale au travail. Pour certains, il s’agissait de la première fois que ces sujets étaient perçus comme essentiels au rendement et à la productivité.
Rachel Lewis, psychologue du travail à l’Université de Londres, se spécialise en santé et bien-être au travail. Elle souligne que les données révèlent une hausse de 25 % des cas de dépression et d’anxiété pendant la pandémie. Mais elle note aussi des changements positifs dans le bien-être des travailleurs :
« Les organisations considèrent désormais la santé mentale comme une priorité stratégique. La pandémie a amené de nombreux travailleurs à repenser leur santé mentale et leur prise en charge de soi. Ils ont aussi pris une plus grande part de responsabilité pour leur bien-être. Ce sont tous des moteurs positifs de changement. »
Michael Cooper, vice-président, Données et partenariats au sein de Recherche en santé mentale Canada, affirme : « La pandémie a eu un effet indéniable sur le stress psychologique. Elle a vraiment permis de sensibiliser les employeurs à l’importance de la santé mentale. »
La psychologue agréée Dayna Lee-Baggley, fondatrice et PDG de Dr. Lee-Baggley et Associates et créatrice de la méthode appelée « Dr. Dayna » en anglais, estime que la pandémie a contribué à rendre les discussions sur la santé mentale plus socialement acceptables. Elle met toutefois en garde les milieux de travail contre l’idée que la crise est derrière nous : « Nous savons que les répercussions psychologiques vont continuer de se manifester. On observe encore beaucoup d’épuisement, de stagnation, de demandes de prestations d’invalidité et de séquelles liés à la pandémie. La pandémie a sensibilisé la population et mis en lumière le fait que beaucoup de gens souffrent, et continueront de souffrir pendant longtemps. »
Au sujet des attentes en temps de crise, elle ajoute : « Il y a eu un changement important dans le degré d’incertitude dans le monde. Nous n’allons pas bien, le monde n’est plus le même, et nous ne devrions pas nous attendre à fonctionner comme avant la pandémie. »
Mais il y a de l’espoir, selon elle. « Il faut croire en toutes les possibilités. Il y a peut-être des choses auxquelles nous n’avons pas encore pensé. La pandémie a causé une grande perturbation, mais elle pourrait aussi nous aider à imaginer un avenir meilleur. »
Mettre les gens au cœur des priorités
Nous avons demandé à des experts en santé et en sécurité psychologiques ce qu’ils pensent des répercussions de la pandémie sur le monde du travail.
Quarante-quatre pour cent ont affirmé que les organisations doivent mettre les personnes au cœur de leurs priorités. Cela suppose des changements systémiques pour prévenir l’épuisement professionnel et cesser de miser sur la « force de volonté » pour provoquer le changement.
Dayna Lee-Baggley l’explique : « Notre batterie de volonté est ce qui se décharge le plus rapidement. On demande aux gens de changer leurs comportements pour aller mieux, alors qu’ils n’en ont pas la capacité. » Elle considère que ce modèle est voué à l’échec. « Le modèle traditionnel repose sur le pouvoir exercé sur les gens, où l’on force les individus à faire ce qu’ils ne veulent pas faire. Les femmes et les personnes issues de la diversité ne veulent pas de ce modèle. Elles veulent être autonomes. Utilisons ce pouvoir pour aider chacun à fonctionner et à s’épanouir. »
Pour réduire le stress et l’épuisement, 50 % des experts consultés ont souligné l’importance de mieux sensibiliser les leaders à ce que signifient la santé et la sécurité psychologiques. Il s’agit notamment de définir des attentes claires et de créer un espace pour que les leaders puissent désapprendre certaines habitudes et en adopter de nouvelles. Il faut aussi leur offrir le soutien nécessaire pour qu’ils puissent créer des environnements souhaitables tout en prenant soin de leur propre santé.
« Il y a dix ans, nous n’avions pas le vocabulaire, mais nous savions qu’il y avait un problème », explique Amanda Muhammad, consultante en gestion du stress à Dallas, au Texas. « Les gens n’osaient pas prendre la parole, surtout au sujet de la gestion du stress. » Elle estime que la Norme nationale du Canada sur la santé et la sécurité psychologiques en milieu de travail a contribué à améliorer la situation, et elle observe des changements positifs depuis cinq ans.
« On comprend maintenant ce qui manquait, et on a les mots pour le dire. » Elle poursuit : « Un esprit stressé n’est pas un esprit en sécurité. Notre état personnel détermine notre état professionnel. »
Ressources supplémentaires
- Gérer le stress. Apprenez à gérer vos réactions face au stress et à préserver votre bien-être.
- Processus de prévention du stress chez les employés. Comprendre la manière d’aborder le stress mental chronique et savoir en reconnaître les dangers. Cet outil propose des stratégies de réduction du risque pour protéger l’employeur et les employés.
- Nommer, affirmer et recadrer : des outils personnels de gestion du stress. Ce matériel d’atelier et ces outils personnels de gestion du stress peuvent aider à acquérir des compétences permettant de reconnaître et de gérer les réactions aux facteurs de stress quotidiens.
- Travailler quand on vit beaucoup de stress ou quand on est malade. Renseignements pour travailler efficacement à l’intention des personnes neurodivergentes ou vivant avec un trouble du déficit de l’attention (TDAH), l’anxiété, l’autisme, la dépression, la dyslexie, la ménopause ou le stress.
- Gestion de l’épuisement professionnel – pour les leaders. Détecter l’épuisement professionnel au sein du personnel, reconnaître les facteurs liés au milieu de travail et prendre des mesures de prévention actives. Ces stratégies visent à protéger les employés hyperperformants et ceux qui se rétablissent d’un épuisement professionnel.
- Prévenir l’épuisement professionnel. Essayez ces stratégies pour déterminer les risques et prévenir l’épuisement professionnel.
- Une personne qui vous est chère souffre peut-être d’épuisement professionnel. Questions et stratégies pour vous aider à engager une conversation de soutien lorsqu’une personne qui vous est chère souffre peut-être d’épuisement professionnel.
- Favoriser la réussite du personnel – Un outil pour élaborer des mesures d’adaptation. Cet outil peut faciliter l’élaboration de mesures d’adaptation ou d’un plan de travail lorsque des difficultés psychologiques, émotionnelles, cognitives ou physiques pourraient avoir des répercussions sur un employé.
Dans le prochain billet, ma collègue et coautrice de l’ouvrage L’évolution de la santé mentale en milieu de travail au Canada, Leanne Fournier, s’entretient avec un PDG primé qui a réussi à réduire le roulement du personnel en s’appuyant sur la santé et la sécurité psychologiques. Découvrez l’Histoire de la santé et de la sécurité psychologiques et lisez tous les blogues de cette série.
Les opinions exprimées dans ce billet de blogue sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement la politique officielle de la Canada Vie ou de Stratégies en milieu de travail sur la santé mentale.